"Du transport de marchandise au transport de rêves" : la Péniche Spectacle
- Eloïse
- May 23, 2019
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La Péniche Spectacle est amarrée au 30 quai St Cyr à Rennes, près du mail François Mitterrand. Deux bateaux complémentaires portent le projet : la Dame Blanche, lieu de forum, et L’Arbre d'Eau, salle de spectacle. Dès le printemps, cette dernière part sur les canaux bretons pour un saison nomade, à la rencontre des publics. Près de 120 à 130 représentations ont lieu chaque année, centrées principalement autour du thème des musiques et voix du monde. Nous avons rencontré Annie Desmoulin, responsable de la programmation artistique.
Comment est né ce projet ? En 1985, le festival des Tombées de la nuit, qui travaillait sur les mémoires collectives, demande à Hugues Charbonneau, comédien et metteur en scène, de créer un spectacle autours de l’univers de la batellerie. Notre compagnie, la compagnie du Pré Perché, réalise alors un travail de collecte autour de ce qu’il s’est passé, sur l’histoire de la batellerie. A ce moment-là, l’activité à été stoppée depuis 1978 et les écluses ne fonctionnent plus. Le spectacle « Sur les chemins de l’eau » est donc mis sur pieds et on part en itinérance sur La Mistrale, la dernière péniche ayant travaillé en Bretagne.
Mais voilà on a eu un déclic. Le travail de collectage, d’écriture c’était tout un monde qui s’ouvrait. On a trouvé que c’était intéressant d’avoir ce lieu mobile qui permettait de faire du lien entre la ville et des territoires qui en 1985 ne faisaient pas partie de la métropole, c’étaient des territoires plus ruraux. On s’est dit qu’il nous fallait un lieu pour nous, la compagnie du Pré Perché, qui puisse être mobile pour aller à la rencontre des publics sur les différents territoires, un lieu qui amène l’imaginaire. Donc on a aménagé la Péniche Spectacle vraiment dans cette dimension-là.
Pouvez-vous nous parler de la programmation culturelle de la Péniche Spectacle ? L’idée d’avoir une saison nomade est fortement liée au fait que l’on était une compagnie de théâtre à l’origine. On a toujours aimé le côté ambulant, pouvoir aller dans des lieux inattendus où l’art est présent. Le bateau, c’est un bel outil pour faire des rencontres, être accueillis sur des territoires et accueillir ces gens en retour sur la péniche. Cette envie de découvrir, de connaître l’altérité résonne avec notre principal axe de programmation, les voix et musiques du monde. Après, même si on ne peut pas résumer la programmation de la Péniche Spectacle à ça, on n’échappe pas à son histoire et le thème des bateliers revient régulièrement. On cherche à transmettre des mémoires.
Quels sont les inconvénients liés au choix de la péniche comme support pour la compagnie de Théâtre ? *explose de rire* C’est un super outil mais qui demande beaucoup d’attention. Il faut beaucoup d’habileté déjà, quand on passe les écluses il ne s’agit pas d’aller couler le bateau ou un petit bateau qui se promène sur le quai. C’est 80 tonnes de métal. La photo de la Dame Blanche quand on l’a achetée est signifiante, quand on voit l’état dans lequel elle était on imagine bien tout le travail qui a dû être fourni. A Rennes il a aussi fallu faire venir les publics car le quai St-Cyr ce n’était pas un endroit sûr. Après, comme pour beaucoup de projets culturels, il a fallu batailler pour obtenir les budgets.
Vous avez donc remarqué une évolution des usages des berges ? Oui, aujourd’hui c’est plein de vie aux bords de l’eau, les gens se sont réapproprié ce territoire-là. Quand on a commencé c’était parfois un peu plus sombre. Le quai St-Cyr était un ancien quai de travail, avec des hangars. D’ailleurs on en avait récupéré un assez délabré. Un jour le toit s’est effondré à cause d’une grosse pluie. Les quais étaient des lieux chargés d’histoire, des lieux où on chargeait et on déchargeait. Aujourd’hui ce sont des lieux de promenade, de balades à vélo.
Quels souhaits formulez-vous pour les berges et le canal de demain ? J’aimerais que ça continue à se développer. Avec ce nouveau dynamisme, les ouvrages d’arts sont entretenus et c’est nécessaire pour nous. Sans entretien, au bout de deux ans la végétation reprend le dessus et les écluses ne fonctionnement plus. Or le travail est abyssal car les mauvaises herbes reviennent rapidement. Si personne n’y voit un intérêt pour le tourisme, un intérêt économique, ça sera laissé à l’abandon.

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